30. L’imposition des mains
Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom, ils chasseront les démons ; ils parleront de nouvelles langues ; ils saisiront des serpents ; s’ils boivent quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal ; ils imposeront les mains aux malades, et les malades seront guéris.
Marc 16.17/18
Je commence par une remarque qui n’a pas forcément de rapport avec le sujet de notre réflexion : c’est ici la seule fois que Jésus fait référence au parler en langues, il en parle en rapport avec la foi, mais pas en relation avec la réception du Saint-Esprit. En plusieurs occasions, par exemple en Jean 16.13, il promet à ses disciples qu’ils le recevront. C’était le bon moment d’ajouter : « Quand vous parlez des langues étrangères, vous saurez que vous l’avez reçu. » Mais il n’en dit rien.
Nous fermons cette parenthèse et nous attardons sur la dernière phrase : ils imposeront les mains aux malades, et les malades seront guéris.
La pratique de l’imposition des mains repose-t-elle sur des bases bibliques ? Ma réponse est oui.
Pouvons-nous, à l’heure actuelle, imposer les mains aux malades pour qu’ils soient guéris, ou cette parole du Seigneur concerne-t-elle uniquement les premiers chrétiens ? Nous allons essayer de répondre à cette question.
Jésus et les apôtres ont imposé les mains.
On lui amena des petits enfants, afin qu’il les touchât. Mais les disciples reprirent ceux qui les amenaient. Jésus, voyant cela, fut indigné, et leur dit : « Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas ; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. Je vous le dis en vérité, quiconque ne recevra pas le royaume de Dieu comme un petit enfant n’y entrera point. » Puis il les prit dans ses bras, et les bénit, en leur imposant les mains.
Marc 10.13/16
Il ne put faire là aucun miracle, si ce n’est qu’il imposa les mains à quelques malades et les guérit.
Marc 6.5
Le père de Publius était alors au lit, malade de la fièvre et de la dysenterie ; Paul, s’étant rendu vers lui, pria, lui imposa les mains, et le guérit.
Actes 28.8
Bien entendu, cette série d’exemples n’est pas exhaustive. Jésus et les apôtres ont imposé les mains, mais pas uniquement pour la guérison, ainsi, nous voyons le Seigneur imposer les mains aux enfants en signe de bénédiction.
Imposer les mains pour la guérison
La guérison des malades demeure cependant la principale raison pour laquelle l’imposition des mains est pratiquée.
Je viens de relire la profession de foi des Assemblées de Dieu. Dans l’article 7, intitulé « l’Église », un alinéa est consacré à la prière pour les malades :
Nous croyons que la prière pour la guérison des malades est une mission de l’Église qui est associée à la prédication de l’Évangile. Cette prière peut s’accompagner des gestes symboliques de l’imposition des mains ou de l’onction d’huile, selon les enseignements de Jésus-Christ. Sans l’opposer à la médecine, et sans fanatisme, nous croyons que la prière pour les malades et les affligés a toujours sa place dans l’annonce de l’Évangile du Dieu compatissant.
Je crois me souvenir qu’il y a quelques décennies, la guérison était un véritable cheval de bataille et que « l’imposition des mains » faisait l’objet d’un article à part entière. D’autre part, je crois comprendre, à la lecture de ce texte, que l’imposition des mains n’est plus l’élément indispensable à la prière pour les malades.
Un vieux pasteur me disait un jour :
« Si tu veux faire une campagne d’évangélisation, il faudra que ta photographie occupe un quart de l’affiche, et que tu fasses imprimer : “Vous qui êtes malade, venez tel jour à telle heure et à tel endroit. Le missionnaire André Fillion vous imposera les mains et vous serez guéri.”
– Mais je ne suis pas missionnaire.
– Ça ne fait rien. Si tu mets “pasteur” ou “évangéliste”, les gens ne viendront pas. »
Je me souviens de ces réunions d’évangélisation qui se terminaient systématiquement par une séance de prière pour les malades et où l’on faisait la queue pour recevoir l’imposition des mains. Quand l’église invitait un prédicateur, le visiteur devait s’y mettre aussi. Sa file était toujours plus longue que celle du pasteur parce que les visiteurs ont toujours plus de puissance. Certains venaient faire la queue tous les dimanches pendant des années, qu’ils soient malades ou non, parce que cela faisait partie des traditions incontournables.
Quand ma femme est malade, je prie pour elle à la maison et souvent, je pose une main sur sa tête ou sur son épaule. J’y vois surtout un geste d’amour.
Imposer les mains pour chasser les démons
Je n’ai trouvé dans les écritures aucun texte dans lequel Jésus ou ses disciples imposaient les mains pour chasser les démons. Peut-être n’ai-je pas bien cherché. Si vous en trouvez un, vous pouvez venir me voir, je ne serai pas vexé.
Une certaine fausse doctrine affirme que toute maladie est liée à une présence démoniaque. En toute logique, si l’on prie pour la guérison, il faut chasser le démon lié à la maladie :
« Esprit de bronchite, sors de cet homme ! »
Imposer les mains pour la réception du Saint-Esprit
Comme nous l’avons dit, dans l’enseignement de Jésus, la réception du Saint-Esprit n’est liée à la xénoglossie. J’insiste sur ce mot compliqué : que ce soit en Marc 16, dans le livre des actes ou dans 1 Corinthiens 12 à 14, il est toujours question de langues étrangères existantes.
Il en est différemment dans le livre des actes. Il apparait à deux reprises que des personnes reçoivent le Saint-Esprit aussitôt après qu’on leur ait imposé les mains.
Les apôtres, qui étaient à Jérusalem, ayant appris que la Samarie avait reçu la parole de Dieu, y envoyèrent Pierre et Jean. Ceux-ci, arrivés chez les Samaritains, prièrent pour eux, afin qu’ils reçussent le Saint-Esprit. Car il n’était encore descendu sur aucun d’eux ; ils avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus. Alors Pierre et Jean leur imposèrent les mains, et ils reçurent le Saint-Esprit.
Lorsque Simon vit que le Saint-Esprit était donné par l’imposition des mains des apôtres, il leur offrit de l’argent, en disant : « Accordez-moi aussi ce pouvoir, afin que celui à qui j’imposerai les mains reçoive le Saint-Esprit. » Mais Pierre lui dit : « Que ton argent périsse avec toi, puisque tu as cru que le don de Dieu s’acquérait à prix d’argent ! »
Actes 8.14/20
Comme je crois l’avoir déjà dit, rien n’est plus dangereux que de prendre d’abord une position doctrinale et de chercher ensuite dans la Bible des textes pour l’étayer. À ce sujet, je vous renvoie à mon article Pourquoi ont-ils parlé en langues ?
D’autre part, nous devons apprendre à discerner, dans la parole de Dieu les événements qui sont normatifs et ceux qui sont liés à des circonstances particulières.
J’ai connu une époque où l’on voyait pendant le culte des chrétiens se dandiner et sauter d’un pied sur l’autre. C’était la grosse mode.
« Pourquoi faites-vous ça ?
– Nous dansons dans le Saint-Esprit. David a dansé devant l’arche, alors vous devez faire pareil, et si vous ne le faites pas, c’est que vous avez deux ou trois wagons de retard.
– Dans ce cas, vous devez faire aussi comme Saül, vous mettre à poil pour prophétiser. (1 Samuel 19.24) »
Parfois je répondais aussi : « Quand je vous verrai danser Coppélia, je serais déjà moins sceptique. »
Voilà pourquoi, là où l’on enseigne que l’on ne reçoit pas systématiquement le Saint-Esprit au moment de la conversion, on vous impose les mains pour que vous le receviez.
La logique est la suivante : vous n’avez pas reçu le Saint-Esprit, tandis que votre pasteur l’a reçu. Il va donc prier pour vous en vous imposant les mains et, par le contact physique de sa main sur votre tête, le Saint-Esprit va se transmettre de lui à vous.
Et voilà le mot qui me fait très peur : transmission.
Si nous croyons qu’un esprit, bon ou mauvais peut se transmettre d’une personne à une autre par un contact physique, nous ne sommes plus dans une démarche orthodoxe, mais dans une démarche spirite, avec tous les dangers que cela comporte.
Ceux qui font la queue pour l’imposition des mains s’attendent à ce que le pasteur leur transmette une puissance qui chassera la maladie.
Dans le mouvement de Toronto, c’est encore bien pire, car il suffit que le pasteur vous touche du bout des doigts pour vous transmettre sa « bénédiction » et vous voilà immédiatement en transe, et vous entrez dans « l’ivresse de l’esprit » (je préfère ne pas mettre de majuscule), et vous grimpez aux murs comme une araignée.
Un chrétien qui avait abandonné le spiritisme disait dans son témoignage :
« Quand le frère m’a imposé les mains pour la première fois, je me suis dit en moi-même : “Oh là la ! Cet homme ! Il en a du fluide !” »
Voilà ! tout est dit dans ce mot fluide. Si quelqu’un veut prier pour votre guérison, avant de l’autoriser à vous imposer les mains, je vous conseillerais de lui poser la question :
« Que représente pour vous cette pratique ? S’agit-il d’une transmission spirituelle ou simplement d’un geste symbolique (comme le précise avec raison la nouvelle profession de foi des ADD) ? »
Imposer les mains pour la consécration.
Mais nous avons dans le livre des Actes plusieurs cas où l’on n’impose les mains ni en vue d’une guérison ni pour la réception du Saint-Esprit, par exemple en Actes 6.1/6.
En ce temps-là, le nombre des disciples augmentant, les Hellénistes murmurèrent contre les Hébreux, parce que leurs veuves étaient négligées dans la distribution qui se faisait chaque jour. Les douze convoquèrent la multitude des disciples, et dirent : « Il n’est pas convenable que nous laissions la parole de Dieu pour servir aux tables. C’est pourquoi, frères, choisissez parmi vous sept hommes, de qui l’on rende un bon témoignage, qui soient pleins d’Esprit-saint et de sagesse, et que nous chargerons de cet emploi. Et nous, nous continuerons à nous appliquer à la prière et au ministère de la parole. »
Cette proposition plut à toute l’assemblée. Ils élurent Étienne, homme plein de foi et d’Esprit-saint, Philippe, Prochore, Nicanor, Timon, Parménas, et Nicolas, prosélyte d’Antioche. Ils les présentèrent aux apôtres, qui, après avoir prié, leur imposèrent les mains.
Dans le cas présent, Étienne et ses compagnons ne sont pas malades, mais envoyés par l’église locale, sur recommandation du Saint-Esprit, pour un ministère particulier. Il en sera de même pour Paul et Barnabas, toujours mandatés par le Saint-Esprit pour une œuvre missionnaire (Actes 13.1/3).
Plus tard, nous voyons Paul faire cette déclaration à Timothée :
N’impose les mains à personne avec précipitation, et ne participe pas aux péchés d’autrui ; toi-même, conserve-toi pur.
1 Timothée 5.22
Timothée doit faire très attention, car s’il impose les mains à n’importe qui sans s’être préparé dans la prière et que le quidam est possédé, au lieu que ce soit le Saint-Esprit qui descende chasser le démon, c’est le démon qui pourrait chasser le Saint-Esprit !
J’ai longtemps adhéré à cette explication, mais maintenant je préfère celle-ci :
Si Timothée se précipite à consacrer ancien une personne qu’il ne connait pas suffisamment, l’église pourrait en pâtir.
Il arrive que, lorsque certaines églises consacrent un pasteur, un ancien, un diacre, ou même un responsable de jeunesse ou un moniteur d’école du dimanche, on officialise cette reconnaissance en priant publiquement pour l’intéressé avec imposition des mains. Je ne suis pas opposé à cette pratique, à condition que tout le monde ait bien compris qu’il ne s’agit pas d’un geste « magique », mais symbolique.
Conclusion : « transmission » ou geste symbolique ?
Je pense que nous sommes maintenant mieux éclairés sur la pratique biblique de l’imposition des mains.
Pouvons-nous imposer les mains pour chasser un démon ou pour que quelqu’un reçoive le Saint-Esprit ? – Absolument pas.
Pouvons-nous imposer les mains dans le cadre de la consécration d’un serviteur de Dieu, ou pour qu’un malade soit guéri ? – En théorie, oui.
Mais il faut respecter deux conditions :
Premièrement, nous ne devons pas systématiser cette pratique comme dans certains milieux où l’on prêche la guérison à tout crin comme si Dieu était dans l’obligation de guérir.
Deuxièmement, il faut absolument insister sur le fait que l’imposition des mains n’a rien à voir avec la transmission de l’Esprit-Saint d’une personne à une autre, mais uniquement un geste symbolique. Il nous rappelle la compassion de Jésus lorsqu’il priait pour les malades ou les perdus.
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