28. En mer avec Paul
Pendant plusieurs jours nous naviguâmes lentement, et ce ne fut pas sans difficulté que nous atteignîmes la hauteur de Cnide, où le vent ne nous permit pas d’aborder. Nous passâmes au-dessous de l’île de Crète, du côté de Salmone. Nous la côtoyâmes avec peine, et nous arrivâmes à un lieu nommé Beaux Ports, près duquel était la ville de Lasée.
Un temps assez long s’était écoulé, et la navigation devenait dangereuse, car l’époque même du jeûne était déjà passée. C’est pourquoi Paul avertit les autres, en disant : « Ô hommes, je vois que la navigation ne se fera pas sans péril et sans beaucoup de dommage, non seulement pour la cargaison et pour le navire, mais encore pour nos personnes. » Le centenier écouta le pilote et le patron du navire plutôt que les paroles de Paul. Et comme le port n’était pas bon pour hiverner, la plupart furent d’avis de le quitter pour tâcher d’atteindre Phénix, port de Crète qui regarde le sud-ouest et le nord-ouest, afin d’y passer l’hiver.
Un léger vent du sud vint à souffler, et, se croyant maîtres de leur dessein, ils levèrent l’ancre et côtoyèrent de près l’île de Crète.
Mais bientôt un vent impétueux, qu’on appelle Euraquilon, se déchaîna sur l’île. Le navire fut entraîné, sans pouvoir lutter contre le vent, et nous nous laissâmes aller à la dérive. Nous passâmes au-dessous d’une petite île nommée Clauda, et nous eûmes de la peine à nous rendre maîtres de la chaloupe ; après l’avoir hissée, on se servit des moyens de secours pour ceindre le navire, et, dans la crainte de tomber sur la Syrte, on abaissa les voiles. C’est ainsi qu’on se laissa emporter par le vent. Comme nous étions violemment battus par la tempête, le lendemain on jeta la cargaison à la mer, et le troisième jour nous y lançâmes de nos propres mains les agrès du navire. Le soleil et les étoiles ne parurent pas pendant plusieurs jours, et la tempête était si forte que nous perdîmes enfin toute espérance de nous sauver.
Actes 27.7/20
Voilà un voyage bien mouvementé, jalonné de désagréments, et que l’apôtre Paul aurait bien pu éviter ! Après tout, il n’était pas obligé d’y aller, à Rome. Essayons de résumer son histoire.
Souvenons-nous qu’au retour de son troisième voyage missionnaire, Paul n’a pas été particulièrement bien accueilli par ses coreligionnaires. Tout d’abord, ils n’appréciaient pas qu’il prêchât Jésus Christ comme le sauveur attendu ; mais ce qu’ils n’aimaient pas du tout, c’est qu’il le prêche aux Goïm, comme si Dieu aimait aussi ces gens-là !
Pour se défendre de leurs accusations, Paul est ballotté d’un représentant à l’autre de l’autorité civile et religieuse. J’avoue qu’entre les Félix, les Agrippa et les Festus, je m’y perds un peu. Toujours est-il qu’usant de son droit, l’accusé en appelle à l’arbitrage de l’Empereur. Quel drôle d’idée de choisir Néron comme juge, n’est-ce pas ?
D’autant plus que le roi, tout comme le gouverneur, se prononçait sur un nom lieu. Inutile d’aller en Cour d’appel.
Le roi, le gouverneur, Bérénice, et tous ceux qui étaient assis avec eux se levèrent, et, en se retirant, ils se disaient les uns aux autres : « Cet homme n’a rien fait qui mérite la mort ou la prison. » Et Agrippa dit à Festus : « Cet homme pouvait être relâché, s’il n’en eût pas appelé à César. »
Actes 26.30/32
Alors pourquoi Paul a-t-il tenu à en appeler à César ? Parce qu’il avait confiance dans la sagesse et la justice de Néron ? Cela m’étonnerait ! Parce qu’il tenait aux honneurs que lui aurait valus la proximité de l’Empereur ? Encore moins !
Non, Paul voulait simplement aller à Rome, et il y trouvait cette occasion d’y aller gratis ; et s’il voulait aller à Rome, ce n’était pas pour visiter le Colisée ni pour dire un petit Ave à Néron. Il voulait y aller pour apporter la parole de Dieu dans la capitale.
Paul s’embarqua donc sur un bateau qui « devait » faire voile vers l’Asie (la Turquie). Remarquez la pertinence du verbe « devait » (Actes 27.2).
Pour mieux comprendre notre étude, je vous invite à vous munir de la carte du dernier voyage de Paul, qui se trouve généralement à la fin de votre Bible.
Tout d’abord, le vaisseau suit un itinéraire logique : une première escale à Sidon, une seconde à Myra où l’on prend la correspondance. Ensuite, le navire longe la côte sud de la péninsule asiatique et s’apprête à aborder à Cnide. La logique nous invite à penser que les marins allaient faire voile vers l’isthme de Corinthe. Le canal n’avait pas encore été construit, mais les navires pouvaient passer d’une rive à l’autre sur des rouleaux : manœuvre pénible, mais qui permettait de gagner beaucoup de temps. Une fois sortis du détroit, ils n’étaient plus qu’à quelques (longues) encablures de la botte de l’Italie.
Curieusement, nous voyons la ligne fléchée, verte sur ma carte, décrire une courbe vers le sud. Ensuite, elle longe le sud de la Crète, repart vers le sud-ouest jusqu’à proximité de la Libye, ensuite elle remonte vers le nord, puis de nouveau vers l’ouest en nous donnant l’impression de naviguer sur la Seine. Enfin, à partir de Malte, elle se dirige au plus court jusqu’à Rome.
J’ai cessé d’accorder la moindre confiance à mon G.P.S. depuis qu’il m’a fait passer par Le Puy pour aller d’Aurillac à Clermont-Ferrand. Les marins de cette époque n’avaient pas de G.P.S. et ils se sont tout de même perdus.
La vigie annonce le port de Cnide.
« Pas trop tôt ! » s’écrient les marins. Nous allons enfin nous reposer et nous amuser un peu. Nous l’avons bien mérité.
En effet, la mer n’avait pas été très bonne, et la navigation pénible depuis la Lycie.
Mais voilà qu’un vent du nord gonfle brusquement les voiles et repousse l’embarcation vers le large. En ce temps-là, c’étaient les vents qui décidaient de l’itinéraire, et Renaud aurait bien pu chanter : « C’est pas l’homme qui prend la mer, c’est la mer qui prend l’homme. »
Les marins reconnaissent enfin le cap Salmoné et, au prix de grands efforts, parvinrent à longer la côte de la Crète et atteignent Beaux-Ports, non sans peine. Et nous, nous sommes arrivés au verset 8 du chapitre 27.
Luc ne nous dit pas pour quelles raisons les marins se sont attardés à Beaux-Ports, toujours est-il qu’ils y restèrent « un temps assez long » et qu’ils commençaient à s’y ennuyer.
Le Yom Kippour est largement passé, l’hiver approchant, la navigation devient dangereuse. Les marins envisagent, malgré tout, de reprendre la mer.
Paul prend à part le centurion responsable des prisonniers :
Ô hommes, je vois que la navigation ne se fera pas sans péril et sans beaucoup de dommage, non seulement pour la cargaison et pour le navire, mais encore pour nos personnes. (verset 10)
Ce conseil n’est pas seulement donné en raison du bon sens et de la sagesse, mais en raison de la révélation divine : le Saint-Esprit a montré à Paul ce qui risquait d’arriver.
Le centurion transmet l’information au capitaine.
« Non, mais, de quoi il se mêle, celui-là ? Je connais mon métier tout de même ! »
Ils décidèrent donc de lever l’ancre et de mettre le cap sur Phénix, Arizona. Non, pardon !
Phénix, aujourd’hui Loutro, ne totalise plus qu’une dizaine de maisons.
Il est vrai que naviguer en cette saison était dangereux, mais il ne faut pas exagérer non plus. Phénix n’est pas très loin ; il suffit de longer la côte sur une soixantaine de kilomètres. On ne risque pas grand-chose. Et puis, Beaux-Port n’est pas un endroit approprié pour passer l’hiver. Allez ! Pas d’hésitations ! On y va !
Les marins pensaient avoir tout intérêt à prendre ce risque. En effet, Beaux-Port était un « trou ». Passer quelques mois d’hiver dans un tel endroit, c’était la neurasthénie assurée. Phénix, au contraire, était un port plus important. On y trouvait plus de commerces, de tavernes, de lieux de distraction et de plaisir.
De nos jours, les distractions et les plaisirs ne sont-ils pas les priorités qui guident nos choix ? Lorsque j’attends mon tour à la caisse de mon centre commercial préféré et que mes yeux tombent immanquablement sur la couverture des Télé-Magazine exhibés au-dessus du tapis roulant pour m’inciter à consommer cette incontournable littérature, je suis atterré de constater à quel point nos contemporains se passionnent pour des futilités alors que les questions existentielles les plongent dans l’indifférence. Comment peut-on ouvrir son âme à la parole de l’Évangile, ou plus vaguement, rechercher un sens pour sa vie alors que rien ne nous intéresse, hormis « Colle en tas », « Secrète histoire » ou « Moins moche la vie » !
Comment le bon grain de la vie peut-il croître sur une terre aussi aride ? Et combien Jésus voit juste quand il raconte et explique à ses disciples, la parabole du semeur !
Ses disciples lui demandèrent ce que signifiait cette parabole. Il répondit : « Il vous a été donné de connaître les mystères du royaume de Dieu ; mais pour les autres, cela leur est dit en paraboles, afin qu’en voyant ils ne voient point, et qu’en entendant ils ne comprennent point. Voici ce que signifie cette parabole : La semence, c’est la parole de Dieu. Ceux qui sont le long du chemin, ce sont ceux qui entendent ; puis le diable vient, et enlève de leur cœur la parole, de peur qu’ils ne croient et soient sauvés. Ceux qui sont sur le roc, ce sont ceux qui, lorsqu’ils entendent la parole, la reçoivent avec joie ; mais ils n’ont point de racine, ils croient pour un temps, et ils succombent au moment de la tentation. Ce qui est tombé parmi les épines, ce sont ceux qui, ayant entendu la parole, s’en vont, et la laissent étouffer par les soucis, les richesses et les plaisirs de la vie, et ils ne portent point de fruit qui vienne à maturité. Ce qui est tombé dans la bonne terre, ce sont ceux qui, ayant entendu la parole avec un cœur honnête et bon, la retiennent, et portent du fruit avec persévérance. »
Luc 8.9/15
« Les soucis, les richesses et les plaisirs de la vie » étouffent la parole qui a été semée en eux !
Nous trouvons dans l’histoire d’Abraham et de son neveu Lot l’exemple d’un homme qui a pris une importante décision en fonction de son intérêt personnel et des satisfactions immédiates :
Lot, qui voyageait avec Abram, avait aussi des brebis, des bœufs et des tentes. Et la contrée était insuffisante pour qu’ils demeurassent ensemble, car leurs biens étaient si considérables qu’ils ne pouvaient demeurer ensemble. Il y eut querelle entre les bergers des troupeaux d’Abram et les bergers des troupeaux de Lot. Les Cananéens et les Phérésiens habitaient alors dans le pays. Abram dit à Lot : « Qu’il n’y ait point, je te prie, de dispute entre moi et toi, ni entre mes bergers et tes bergers ; car nous sommes frères. Tout le pays n’est-il pas devant toi ? Sépare-toi donc de moi : si tu vas à gauche, j’irai à droite ; si tu vas à droite, j’irai à gauche. »Lot leva les yeux, et vit toute la plaine du Jourdain, qui était entièrement arrosée. Avant que l’Éternel eût détruit Sodome et Gomorrhe, c’était, jusqu’à Tsoar, comme un jardin de l’Éternel, comme le pays d’Égypte. Lot choisit pour lui toute la plaine du Jourdain, et il s’avança vers l’orient. C’est ainsi qu’ils se séparèrent l’un de l’autre. Abram habita dans le pays de Canaan ; et Lot habita dans les villes de la plaine, et dressa ses tentes jusqu’à Sodome. Les gens de Sodome étaient méchants, et de grands pécheurs contre l’Éternel.
Genèse 13.5/13
Les marins décident donc de lever l’ancre et de partir vers Phénix. D’autant plus qu’il fait beau, le ciel est bleu, la mer aussi, un léger vent du sud souffle, c’est justement ce qu’il leur faut pour naviguer confortablement, ils se croient maîtres de leurs projets (vs 13), la traduction Semeur 2000 nous donne un tableau plus réaliste : « Une légère brise du sud s’était levée et ils voyaient déjà leur projet réalisé. »
Dans ces moments-là, on a l’impression que le monde est à nos pieds, que tout ce que l’on entreprend nous réussit. L’occitan benastruc : né sous une bonne étoile, a donné en français populaire le mot « veinard ». Et puisque nous avons les étoiles de notre côté, nous n’avons pas besoin de demander l’avis de Dieu, encore moins sa protection.
À peine ont-ils perdu le port des yeux qu’un vent qu’ils n’ont pas invité dévale des hauteurs de l’île et se met soudain à gonfler leurs voiles : l’Euraquilon, un vent aussi violent qu’inattendu.
Que l’Euraquilon se mette à souffler sur nos vies, et nous devenons des malastrucs : des malotrus.
Tous les projets que nous voyions déjà se réaliser tombent à l’eau. C’est bien le cas de le dire !
Quand il avait dix ans, mon père rêvait de devenir aviateur. Il en avait sans doute les capacités, mais il a dû terminer ses études à la sixième. Quel Euraquilon avait soufflé sur sa vie ? La Seconde Guerre mondiale. À cause de cette tempête, sa carrière aéronautique s’est limitée à construire et faire voler des modèles réduits en balsa.
Un incendie, un décès, un accident que nul ne peut prévoir, et toute une vie est engloutie dans la tourmente.
C’est ce qui est arrivé à Moïse, enfant trouvé destiné à mener une vie de prince, bien qu’il ait eu sa part de responsabilité dans l’accident.
Quand il eut grandi, elle l’amena à la fille de Pharaon, et il fut pour elle comme un fils. Elle lui donna le nom de Moïse, car, dit-elle, je l’ai retiré des eaux.
En ce temps-là, Moïse, devenu grand, se rendit vers ses frères, et fut témoin de leurs pénibles travaux. Il vit un Egyptien qui frappait un Hébreu d’entre ses frères. Il regarda de côté et d’autre, et, voyant qu’il n’y avait personne, il tua l’Egyptien, et le cacha dans le sable. Il sortit le jour suivant ; et voici, deux Hébreux se querellaient. Il dit à celui qui avait tort : « Pourquoi frappes-tu ton prochain ? » Et cet homme répondit : « Qui t’a établi chef et juge sur nous ? Penses-tu me tuer, comme tu as tué l’Egyptien ? » Moïse eut peur, et dit : « Certainement la chose est connue. » Pharaon apprit ce qui s’était passé, et il cherchait à faire mourir Moïse. Mais Moïse s’enfuit de devant Pharaon, et il se retira dans le pays de Madian, où il s’arrêta près d’un puits.
Exode 2.10/15
Que de temps perdu pour un coup de poing !
Temps perdu ? Peut-être pas.
L’Éternel aurait très bien pu appeler Moïse et le former au ministère à la cour de Pharaon, mais il était nettement préférable qu’il rencontre Dieu, loin de cette cour bruyante et futile qui l’aurait empêché d’entendre sa voix, loin de ces fastes rutilants qui l’auraient empêché de voir le buisson brûler au désert.
Mais reprenons notre voyage.
Le navire fut entraîné par cet Euraquilon et le capitaine, ne pouvant dominer les vents, n’a pas d’autre choix que de laisser son bateau dériver. On verra bien où cela nous conduira. (vs 15)
Ayant abandonné l’espoir d’accoster à Clauda, ou Cauda, les marins se laissent porter en pleine mer. C’est à ce moment qu’ils comprennent l’importance du péril et commencent à parler de naufrage.
C’est la conclusion la plus terrible et la plus irréversible. Quand le bateau a fait naufrage, il ne reste plus de solution. S’il y a une chose que nous devons à tout prix éviter dans nos vies, c’est le naufrage.
Il peut arriver aussi que notre vie d’enfant de Dieu se solde par un naufrage. C’est ce qui est arrivé à Hyménée et Alexandre.
Le commandement que je t’adresse, Timothée, mon enfant, selon les prophéties faites précédemment à ton sujet, c’est que, d’après elles, tu combattes le bon combat, en gardant la foi et une bonne conscience. Cette conscience, quelques-uns l’ont perdue, et ils ont fait naufrage par rapport à la foi. De ce nombre sont Hyménée et Alexandre, que j’ai livrés à Satan, afin qu’ils apprennent à ne pas blasphémer.
1 Timothée 1.18/20
L’expression « livrer à Satan » ne signifie pas que l’apôtre avait le pouvoir d’envoyer les gens en enfer, mais simplement qu’il les a virés de l’église.
Comment ces deux hommes ont-ils fait naufrage, et de quelle manière ont-ils blasphémé ? Paul préfère nous épargner des détails peu édifiants.
Il ne s’agit pas ici de chrétiens qui traversent des crises spirituelles plus ou moins graves et qui en arrivent à préférer l’ambiance du monde à celle de l’église. Pour ceux-là, il reste une chance d’échapper au naufrage. Hyménée et Alexandre en sont venus à un point de non-retour en reniant définitivement Jésus-Christ.
Et pourtant, ils avaient mouillé au port du salut. Ils avaient levé l’ancre par une belle journée ensoleillée. Un vent suave poussait tranquillement leur embarcation sur la mer de la grâce. Ils jetaient les filets dans l’eau en soupirant de bonheur : « Quelle chance nous avons d’être porté par la pneuma : le vent du Saint-Esprit ».
Soudain, l’Euraquilon s’est précipité sur eux : un vent nommé « amour de l’argent », « amour des femmes », ou « amour des honneurs », à moins que ce ne soit le vent nommé « orgueil spirituel », « mysticisme », « hérésie », ou « déviation sectaire ». Quand ce vent s’est mis à souffler, Alexandre et Hyménée n’ont pas su manœuvrer leurs voiles de façon à éviter le désastre, et ils ont péri dans les flots impétueux de la perdition.
Lorsqu’ils réalisent la gravité du danger, les marins vont exercer trois tentatives pour s’en sortir :
D’abord, aux versets 16 et 17, ils vont essayer, en pure perte, de mettre une chaloupe en mer. Ils ont alors ceinturé le navire avec des cordages, pour éviter que la coque éclate sous la pression des vagues. Craignant d’aller s’échouer sur la Syrte (la côte libyenne), ils abaissent les voiles. Une autre traduction dit : ils jettent l’ancre flottante. C’est une sorte de grande palette qu’ils traînent derrière le bateau et qui permet de le stabiliser par rapport au vent.
Toutes ces tentatives nous rappellent la vanité de nos efforts pour redresser une situation désespérée. C’est comme si une dizaine de pompiers essayaient de maîtriser ces incendies qui, chaque été, ravagent la Côte d’Azur en faisant la chaîne avec des seaux.
Mais, le deuxième jour, la tempête redouble de violence et toutes ces précautions ne suffisent pas. Les marins balancent, balle après balle, tonne après tonne, toutes les marchandises qu’ils comptaient vendre à Rome et qui constituaient la principale raison de leur voyage. (vs 18)
Là, ça devient grave !
La cargaison représente toute leur richesse, mais elle alourdit dangereusement le navire. Ils ont dû longtemps hésiter, tergiverser et discutailler avant d’en venir à cette décision. Mais ils n’avaient pas le choix : c’est ça ou la tasse. Mieux vaut sombrer dans la ruine que dans la Méditerranée.
Il faut parfois des malheurs dans nos vies pour comprendre que nos richesses et notre confort matériel ne nous apportent qu’une illusion de bonheur.
Quelqu’un dit à Jésus, du milieu de la foule : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage. » Jésus lui répondit : « Ô homme, qui m’a établi pour être votre juge, ou pour faire vos partages ? » Puis il leur dit : « Gardez-vous avec soin de toute avarice ; car la vie d’un homme ne dépend pas de ses biens, fût-il dans l’abondance. » Et il leur dit cette parabole : « Les terres d’un homme riche avaient beaucoup rapporté. Et il raisonnait en lui-même, disant : Que ferai-je ? car je n’ai pas de place pour serrer ma récolte. Voici, dit-il, ce que je ferai : j’abattrai mes greniers, j’en bâtirai de plus grands, j’y amasserai toute ma récolte et tous mes biens ; et je dirai à mon âme : Mon âme, tu as beaucoup de biens en réserve pour plusieurs années ; repose-toi, mange, bois, et réjouis-toi. Mais Dieu lui dit : Insensé ! cette nuit même ton âme te sera redemandée ; et ce que tu as préparé, pour qui cela sera-t-il ? Il en est ainsi de celui qui amasse des trésors pour lui-même, et qui n’est pas riche pour Dieu. »
Jésus dit ensuite à ses disciples : « C’est pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous serez vêtus. La vie est plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement. Considérez les corbeaux : ils ne sèment ni ne moissonnent, ils n’ont ni cellier ni grenier ; et Dieu les nourrit. Combien ne valez-vous pas plus que les oiseaux ! Qui de vous, par ses inquiétudes, peut ajouter une coudée à la durée de sa vie ? Si donc vous ne pouvez pas même la moindre chose, pourquoi vous inquiétez-vous du reste ? Considérez comment croissent les lis : ils ne travaillent ni ne filent ; cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux. Si Dieu revêt ainsi l’herbe qui est aujourd’hui dans les champs et qui demain sera jetée au four, à combien plus forte raison ne vous vêtira-t-il pas, gens de peu de foi ? Et vous, ne cherchez pas ce que vous mangerez et ce que vous boirez, et ne soyez pas inquiets. Car toutes ces choses, ce sont les païens du monde qui les recherchent. Votre Père sait que vous en avez besoin. Cherchez plutôt le royaume de Dieu ; et toutes ces choses vous seront données par-dessus. Ne crains point,
petit troupeau ; car votre Père a trouvé bon de vous donner le royaume. »
Luc 12.13/32
Quelqu’un a récemment réalisé un documentaire sur les derniers jours de Pompéi. Des chercheurs ont pu, d’après les fouilles, traduire l’activité et l’attitude de victimes de ce désastre soudain. Parmi elles, un serviteur qui aurait pu sauver sa vie s’il n’avait pas profité de la confusion pour fouiller dans le coffre-fort de son maître.
Parlons aussi d’un naufrage qui nous pend au nez si nous préférons les richesses d’en bas à celles d’en haut. Manquer l’enlèvement.
Et revenons à Lot.
Nous nous souvenons de son choix malencontreux, motivé par sa recherche de richesse et de confort. Nous savons aussi qu’il avait pris ses aises dans cette ville corrompue, et qu’il comptait parmi les notables. Mais Lot, bien qu’il ne fût pas le héros le plus spirituel de la Bible, a compris le message de Dieu. Il fut le seul à décider de sauver sa vie, et celle de sa famille au prix de l’abandon de ce qu’il aimait le plus : richesse, confort, honneurs.
Ce qui arriva du temps de Lot arrivera pareillement. Les hommes mangeaient, buvaient, achetaient, vendaient, plantaient, bâtissaient ; mais le jour où Lot sortit de Sodome, une pluie de feu et de soufre tomba du ciel, et les fit tous périr. Il en sera de même le jour où le Fils de l’homme paraîtra.
En ce jour-là, que celui qui sera sur le toit, et qui aura ses effets dans la maison, ne descende pas pour les prendre ; et que celui qui sera dans les champs ne retourne pas non plus en arrière. Souvenez-vous de la femme de Lot. Celui qui cherchera à sauver sa vie la perdra, et celui qui la perdra la retrouvera.
Luc 17.28/33
Il est parfois difficile de faire le bon choix quand il s’agit de nos intérêts matériels, il l’est plus encore lorsque nos sentiments sont de la partie.
Un de mes cousins, que la vie n’avait pas favorisé, commençait à venir à l’église et, ce qui est le plus important, à s’approcher du Seigneur. Toute la famille se réjouissait en voyant qu’il avait enfin trouvé la paix pour son cœur et le repos pour son âme.
Malheureusement, alors qu’il envisageait de prendre les eaux du baptême, il a fait la connaissance d’une jeune femme engagée dans l’occultisme qui l’a rapidement détourné de sa foi naissante. Il a terminé sa course asphyxiée dans son garage, et je crains fort que mon infortuné cousin ne soit pas sauvé.
Le troisième jour, la tempête ne s’est toujours pas apaisée (vs 19). L’équipage prend une décision encore plus désespérée : ils jettent par-dessus bord les agrès du navire. Ils se débarrassent d’accessoires indispensables à la navigation.
« De toute façon, au point où nous en sommes, nous n’en avons plus besoin. »
Il est tragique d’être privé de ses richesses quand on s’y est habitué, mais être privé de l’indispensable, du minimum vital…
C’est pourtant ce qui est arrivé à Job, qu’on aurait aujourd’hui qualifié de milliardaire et qui, en un seul jour, se retrouve, au sens premier du terme, sur la paille. Il a perdu ses richesses, son toit, ses enfants. Il est frappé d’une terrible maladie : l’éléphantiasis, selon les spécialistes.
Le pire pour lui sera encore d’entendre sa femme, qu’il aimait tant, renier sa foi et lui dire « Maudis ton Dieu, et meurs ! »
Mais ce qui est merveilleux, alors que nous sommes souvent prêts à lâcher la main de Jésus à la moindre contrariété (« Eh bien puisque c’est comme ça ! »), Job persévère dans sa fidélité :
Je suis sorti nu du sein de ma mère, et nu je retournerai dans le sein de la terre. L’Eternel a donné, et l’Eternel a ôté ; que le nom de l’Eternel soit béni !
Job 1.21
Plusieurs jours ont passé (vs 20/21), la tempête n’est toujours pas calmée, on ne sait même pas où l’on est, car la boussole, inventée depuis longtemps par les Chinois, n’est pas encore parvenue dans le monde romain et sans un ciel étoilé, il est impossible de se diriger. En plus, ils n’ont rien à manger, car ils ont depuis longtemps fait bouillir le dernier sac de fayots. C’est vraiment la fin des haricots.
Dieu est souvent contraint d’attendre la dernière extrémité pour parler aux hommes, car tant qu’il reste une goutte de jus dans le citron de leur vie, ils ne sont pas disposés à l’écouter.
Paul, qui jusqu’à ce moment avait passé pour un nigaud, va enfin pouvoir s’exprimer :
Ô hommes, il fallait m’écouter et ne pas partir de Crète, afin d’éviter ce péril et ce dommage. (vs 21)
C’est vrai, ils auraient dû écouter l’homme de Dieu. Jésus nous répète souvent : « vous devriez écouter mes paroles ». Sa parole commence par un malheureux constat :
Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu.
Romains 3.23
Tous les hommes, sans exception, ont mené leur vie comme si Dieu n’existait pas. C’est tout simplement cela, le péché. Faut-il s’étonner qu’une vie menée sans jamais écouter sa voix se termine toujours par un naufrage ?
Mais cet avertissement : « Vous auriez dû m’écouter », se poursuit par une parole d’espérance : « Prenez courage. »
Et Paul développe la vision qu’il a reçue du Seigneur : « Il est dans la volonté de Dieu que je parvienne vivant devant l’Empereur, le bateau ne coulera donc pas, et vous ne mourrez pas non plus. Dieu nous sauvera de ce naufrage ».
En effet, si notre état de péché est une mauvaise nouvelle, elle est assortie d’une bonne : Jésus nous aime, tout pécheurs que nous sommes, et bien que le naufrage produit dans nos vies par le péché devrait nous conduire à la mort, il désire que nous vivions. Le mot salut prend ici toute sa puissance. Il veut nous sauver de la perdition en mer, mais aussi et surtout, de la perdition éternelle.
Dis-leur : « Je suis vivant ! dit le Seigneur, l’Eternel, ce que je désire, ce n’est pas que le méchant meure, c’est qu’il change de conduite et qu’il vive. Revenez, revenez de votre mauvaise voie ; et pourquoi mourriez-vous, maison d’Israël ? »
Ézéchiel 33.11
Si le navire de notre vie fit naufrage, n’hésitons pas à envoyer à Jésus un SMS (save my soul / sauve mon âme). Son secours ne nous parviendra pas trop tard.
Et invoque-moi au jour de la détresse ; Je te délivrerai, et tu me glorifieras.
Psaume 50.15
Je te délivrerai : ta vie sera sauvée du naufrage et ton âme sera guidée jusqu’au port de la vie éternelle, car, si tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu ; et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ. C’est lui que Dieu a destiné, par son sang, à être, pour ceux qui croiraient victime propitiatoire, afin de montrer sa justice, parce qu’il avait laissé impunis les péchés commis auparavant, au temps de sa patience, afin, dis-je, de montrer sa justice dans le temps présent, de manière à être juste tout en justifiant celui qui a la foi en Jésus.
Romains 3.24/26
La fin du chapitre 27 nous raconte dans les détails la façon dont les vents ont poussé le navire vers l’île de Malte. Il me paraît impossible que ce vaisseau, délesté de ses agrès et perdu dans l’immensité de la Méditerranée ait pu prendre pied sur une île aussi petite. C’est le miracle de la direction divine.
Le bateau était brisé, la cargaison perdue, mais aucun de ces Robinson n’avait perdu la vie.
C’est le principal.
Ils sont sauvés, mais ils n’ont plus rien.
C’est ce qui arrive quand Jésus nous sauve du naufrage du péché.
Nous arrivons indemnes sur l’île de la croix, mais nous avons tout perdu : tout ce qui fait notre richesse, tout ce qui fait notre force, tout ce qui fait notre fierté. Nous avons tout perdu de notre vie ancienne, nous sommes morts à nous-mêmes, mais nous pénétrons dans cette vie nouvelle, sans rien regretter de ce que nous avons laissé derrière nous. Combien il est vrai ce chant bien connu !
Tu peux naître de nouveau,
Tu peux tout recommencer
Balayer ta vie passée
Et repartir à zéro,
Et repartir à zéro
Avec Jésus pour berger.
En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu.
Jean 3.3
Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici, toutes choses sont devenues nouvelles. Et tout cela vient de Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par Christ, et qui nous a donné le ministère de la réconciliation.
2 Corinthiens 5.17/18
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